Villes Architectures et Territoires

Département VAT – École Nationale Supérieure d'Architecture de Paris Malaquais / "Cities Architecture Territories" Department

L’autre ville : Architectures à l’épreuve de l’a-métropole – Studio (P8)

Encadrants : Patrick Henry, architecte et Amélie Nicolas, sociologue

Objectifs

A l’écart des grandes agglomérations et loin des centres actifs, des villes voient leur population se réduire et vieillir. Partout dans le monde, les jeunes actifs, les sièges des grandes entreprises attirés par le city-branding abandonnent ces villes moyennes pour les métropoles. Pourtant elles continuent à vivre! Certaines, de Détroit à Dison en Belgique, renaissent en inventant de nouveaux modèles de re-développement qui deviendront sans doute des laboratoires urbains pour l’avenir et qui interrogent la place de l’architecte et de l’architecture.

 

Ce studio propose une immersion dans un contexte a-métropolitain pour travailler de façon expérimentale sur des situations concrètes, en partenariat avec les acteurs locaux. En effet, la relation entre nos exercices pédagogiques et les carences, parfois, des services techniques et urbains de ces villes devient un enjeu de projet pour donner sens et service à une politique de redéploiement urbain, au contact de ses habitants.

 

Ces contextes dépréciés recèlent des enjeux économiques, sociaux et politiques particuliers : désindustrialisation, désouvriérisation, évolution vers des sociétés multi-ethniques, précarité croissante, crise de la relation aux institutions… S’engager sur ces territoires nous permettra un décentrement certain par rapport aux modèles dominants de la métropolisation.

Ce sont des territoires à regarder « avec amitié » comme nous y engageait déjà Paola Vigano pour la ville diffuse ou la métropole horizontale, parce qu’ils sont prometteurs et parce qu’on ne peut pas agir sur des territoires que l’on réprouverait. On se posera ainsi « Contre Télérama » (Chauvier, 2011) et pour le droit à la ville, à l’architecture et à l’urbanisme, de ce que certains appellent encore « la France moche ».

 

Comment refaire lieu pour refaire société ? Comment repenser alors l’action urbaine et un désir d’architecture en lien avec le bien commun et l’hospitalité de ces villes?

Cette forme de résilience urbaine constitue la base de ce studio où nous réfléchirons sous différents axes sur une ville moyenne française afin d’imaginer des processus d’installation de nouvelles formes d’urbanités et de nouveaux modèles pour l’avenir.

 

Contenu, organisation

Cette année, la ville de Dieppe (Seine-Maritime – à 2 heures de Paris) a accepté d’être partenaire de notre atelier. C’est une ville d’un peu plus de 30 000 habitants, ayant connu un réel essor grâce au développement de son port maritime et du tourisme balnéaire. Elle est aujourd’hui en situation de décroissance économique et démographique, accentuée par des problématiques d’exclusion sociale et de pauvreté.

Le partenariat engagé avec les acteurs locaux devra alors nous permettre :

  • d’accéder à l’ensemble de la documentation produite par les différents services techniques et politiques ;
  • d’organiser des temps d’échanges avec ces mêmes acteurs, de nous mettre en contact avec les tissus économiques locaux, et de nous accueillir (hébergement et salle de travail) lors d’une semaine d’atelier in situ et pour d’autres jours de retour au terrain.

 

Ce studio vise à établir des stratégies urbaines, paysagères ou architecturales de reconquête de l’ensemble du territoire d’étude ou d’une partie significative. Il s’appuie sur le croisement des savoirs socio-politiques, anthropologiques, cartographiques, mêlés à des observations in situ.

Dans un contexte de crise, les méthodes traditionnelles de l’urbanisme et de la planification se révèlent très souvent inopérantes. L’apport d’autres savoirs que ceux usuellement utilisés dans l’élaboration du projet doit permettre de le questionner, le déconstruire et ce, en coordination/partenariat avec les acteurs locaux.

Plutôt qu’un schéma directeur ou un plan-guide, l’objectif est de construire des stratégies adaptées aux contextes de la commune en entremêlant les échelles, en s’intéressant aussi bien à la grande échelle qu’à des dispositifs architecturaux situés, pérennes ou temporaires.

Il s’agit d’aboutir à une architecture de l’engagement, moins centrée sur la notion de création ou d’œuvre que sur celle de service, gage également d’une mise en situation intellectuelle et professionnelle des étudiants. Les interventions devront se comprendre aussi bien en les racontant (le récit comme engagement) qu’en les montrant (la représentation comme proposition).

 

Nous proposons d’organiser ce studio sous la forme d’un atelier collectif et délibératif, dans le sens du débat, engageant l’étudiant dans une dynamique de propositions individuelle et collective. Ainsi, la restitution du travail sera envisagée de façon continue tout au long du semestre. Les projets des étudiants devront permettre de démontrer qu’un renouvellement économique et culturel passe aussi par l’architecture.

 

Modes d’évaluation

Le studio est organisé selon un certain nombre de séances et de rendez-vous (et non « à la carte ») selon un rythme amenant progressivement à l’autonomie de l’étudiant.

Les séances alternent des moments de discussions collectives, de prise de parole des étudiants et de présentations effectuées par les enseignants ou des personnalités invitées.

L’évaluation du P8 s’appuie sur la présence, la participation, et la critique lors des présentations intermédiaires et du jury final.

L’absence répétée à ces séances et jurys (3 absences non justifiées) et l’absence d’avancement dans le travail au bout de 3 semaines conduiront à l’exclusion des enseignements.

 

Travaux à rendre

Les affichages des projets se font sous forme d’installation (préférée au panneau de présentation « standard »). Ils devront témoigner de la diversité des sources et des points de vue sur la situation étudiée.

Ces installations témoignent du travail produit à l’initiative de l’étudiant, de son esprit critique et de sa prise d’autonomie. Elles permettent la discussion et la critique avec les enseignants, les membres du jury et les personnalités locales.

 

Repères bibliographiques

  • Boniburini L., Boniburini, I., Moretto, L., Smith, H., le Maire de Romsée, J. (2013), La ville comme bien commun : planification urbaine et droit à la ville, Cahier d’Architecture de la Faculté La Cambre-Horta, Bruxelles, La lettre volée
  • Chauvier E. (2011), Contre Télérama, Alia
  • Choay F. et Merlin P., 2015 (4éd.), Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, Paris, Presses Universitaires de France
  • Dardot P., Laval C. (2014), Essai sur la révolution au XXIe siècle, Paris, La Découverte
  • Gravier J-F., (1947), Paris et le désert français, Le Portulan
  • Lacour C. (2004) « L’aménagement du territoire ». In : Ferrandon B., La politique économique et ses instruments. La Documentation française, Paris
  • OBRAS et Collectif AJAP14, Nouvelles richesses. Catalogue du Pavillon Français de la 15e Biennale d’Architecture de Venise 2016
  • Ostrom E. (2010), Gouvernance des biens communs, Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, Edition De Boeck (ed. Originale. 1990. Governing the Commons: The Evolution of Institutions for Collective Action, Cambridge University Press)
  • Vigano P., 2012, Les territoires de l’urbanisme, le projet comme producteur de connaissance, Genève, Métis Presse, vuesDensemble (coll.)
  • Wolff M., Sylvie Fol, Hélène Roth et Emmanuèle Cunningham-Sabot, « Shrinking Cities, villes en décroissance : une mesure du phénomène en France », Cybergeo : European Journal of Geography [En ligne], Aménagement, Urbanisme, document 661, mis en ligne le 08 décembre 2013 URL : http://cybergeo.revues.org/26136
  • « Les villes moyennes contre-attaquent », Urbanisme, n°378, mai-juin 2011
  • Projet de recherche de la DATAR : « 20 villes moyennes témoins »
  • Colloque « Villes petites et moyennes, un regard renouvelé », Tours (9-10 déc 2010) // Articles publiés dans la Revue d’Economie régionale et urbaine, « Mutations économiques des villes petites et moyennes », avril 2012/2, Armand Colin